"J'étais tellement sonné que je suis tombé".

Le 31 mars 2016, Glenn, lycéen mineur, manifestait contre la loi El Khomri dans les rues de Rennes. Victime de violences policières, il nous raconte...

Je suis descendu dans la rue ce jeudi 31 mars afin de défendre mes droits, mon avenir et pour éviter une contre-révolution. En tant que mineur, je ne peux pas voter donc je m'exprime comme je peux avec ce que j'ai.

Dans quel état d'esprit étais-tu?

J'étais révolté, déterminé à ce que ce projet de loi ne passe pas. Il ne faut pas que cette loi passe! Cependant, je reste pacifique tant que les forces de l'ordre le sont et qu'elles n'abusent pas de leur pouvoir. Un CRS ayant des ordres à suivre se doit de respecter les règles de sécurité qui vont avec ces ordres.

Justement, tu dis avoir été victime de violences policières ce jour-là. Que s'est-il passé?

Je portais le brassard rouge qui indique que j'ai du matériel médical sur moi. Un homme a crié "Médic!". Je me suis précipité vers lui, me retrouvant en première ligne, pour lui donner du sérum physiologique contre le gaz lacrymo. Tout d'un coup, j'ai entendu "Ça charge!". J'ai à peine eu le temps de me retourner que j'ai senti un énorme choc sur la joue! J'étais tellement sonné que je suis tombé. Une personne est venue me relever et tout le monde autour de moi me tendait de quoi soulager mes yeux. Ils n'ont pas tout de suite compris qu'un membre des forces de l'ordre venait de me tirer une balle de LDB40 à quelques petits centimètres de mon œil gauche.

Le LDB40 est en effet une arme à projectiles "mi-dur" comme celui qui t'a touché au visage. Il a été conçu en 2006 pour riposter à des balles réelles... Es-tu allé à l'hôpital et as-tu porté plainte auprès de l'IGPN (inspection générale de la police nationale)?

Oui je suis allé à l'hôpital tout de suite après mais je ne peux pas porter plainte... Ça risque de se retourner contre moi. J'ai entendu dire qu'un homme à Nantes l'a fait et s'est fait tabasser par trois gendarmes en civil ensuite... De plus, lors de la manifestation, nous tentions d'accéder au Parlement même si on nous l'avait interdit.

Es-tu retourné en manifestation depuis?

Oui. Deux fois.

Es tu toujours dans le même état d'esprit que le 31 mars ou quelque chose a changé?

Je suis encore plus motivé et je m'intéresse de plus en plus aux violences policières qu'il faut dénoncer. Dans mon cas, ce policier n'avait pas à viser mon visage (1).

Propos recueillis par L'oeil d'une blonde.

1. En 2009, la Direction Centrale de la Sécurité Publique avait rappelé la proscription de viser "au niveau du visage ou de la tête".

Projectile de LDB40 qui a blessé Glenn.